L’expérience

Spectacle inspiré du roman L’Amant de Marguerite Duras

Salle studio
RO

Avec
Gizella Kicsid

Avec : Gizella Kicsid


metteur en scène
Gábor Viola
 
conseiller dramaturgique
Balázs Bodolai
 
images vidéo
Tamás György
 
régie plateau
Pál Böjthe

Date de la création: 20 janvier 2017

Lorsque les rayons du soleil entrent par la fenêtre, il est fort probable qu’une lumière blanche apparaît dans un point quelconque de la pièce, bordée de l’ombre du cadre de la fenêtre ou striée par les nervures des branches dépouillées de l’arbre qui pousse devant la maison. Ces lignes existent-elles pour de vrai ? Je les vois : par conséquent, elles existent. En même temps, je sais que ces lignes ne sont que le produit de mon imagination, des projections pures. Au moment où mes yeux se braquent sur des événements du passé, ils me joueront, peut-être, les mêmes tours que la lumière du soleil ou la lumière du réflecteur. Mon regard, qui perce beaucoup de choses, dessine une image qui, à la fois, existe et n’existe pas. Le passé devient présent, ou peut-être ne s’agit-il que d’une projection du passé ici et maintenant. À chaque fois, l’idéal c’est de rester ouvert. De cette manière, l’image nouvelle et inédite qui s’étale devant mes yeux va peut-être m’ensorceler. Au fur et à mesure que je m’y plonge, recherche, découverte et création s’entremêlent.     
Le souvenir est une création en soi. Nous dirigeons notre attention vers quelque chose d’inexistant. Pour être plus précis, le souvenir existe, mais il est invisible. En l’obligeant à se matérialiser, nous le reconstituons, nous le ré-poétisons. Combien de variantes en faisons-nous? Autant que nécessaires. Le présent transcrit le passé qui, à son tour, reflète le présent.
La protagoniste du roman L’Amant de Marguerite Duras est l’auteure elle-même, à l’âge de seulement quinze ans et demi. L’action se déroule dans une colonie éloignée de la France, en Asie. L’héroïne a une relation scandaleuse avec un homme plus âgé qu’elle de dix ans. La voix de l’adolescente alterne avec celle de l’auteure arrivée à l’âge de la maturité. Celle-ci tente de se rappeler le passé. Laquelle des deux est la plus crédible ? En lisant les œuvres et les entretiens de Marguerite Duras, nous constatons avec stupeur que la variante du récit, que nous considérions être la vraie, devient de plus en plus opaque au fur et à mesure que la relation de l’auteure avec sa propre personne, avec sa propre création, avec le présent et l’avenir se précise. Nous nous y reconnaissons même, peut-être. Nous sommes nous-mêmes les créateurs, les poètes de notre propre passé.