Après Tirso de Molina, presque de Molière, mais aussi un peu de Mozart et Ponti, ainsi que Georges Bataille
Version de Matthias Langhoff et Eszter Biró
Musique: Katalin Incze G.
Atelier
UNE HISTOIRE ANCIENNE
1
Dans un livre oublié de ma bibliothèque, j'ai lu un jour l'histoire qu’une jeune fille qui, se promenant à Séville dans la lumière éclatante de l’été, avait découvert une église fondée, disait-on, par le célèbre séducteur de femmes, Don Juan. Une plaque de cuivre indiquait que la tombe de Don Juan se trouvait là, sous le portique, conformément à son désir. Le pécheur repenti l'avait voulu ainsi, afin d'être foulé par tous jusqu'aux plus misérables. La jeune fille fût prise d'un tel fou rire, qu'elle fut incapable - ou renonça - à retenir son urine, qui dégoulina le long de ses jambes et coula en filet sur la pierre tombale.
Quelques années plus tard j’ai essayé de trouver cette église à Séville. Personne ne pouvait m’aider. Personne ne connaissait, ni de la tombe, ni de l’église.
Finalement j’ai trouvé la tombe et la pierre tombale baptisée d’urine. Mais pas dans une église, ni même pas dans un cimetière. Elle de trouvait en bordure de l'excavation d'un chantier - construction ou démolition -, à trois-mille-quatre-cent-soixante-quatre kilomètres à l’Est de Séville. Je me suis baissé, j’ai essuyé la saleté vieille de plusieurs siècles qui recouvrait la patine de la plaque et j’ai lu: « Je ne voulais pas que l'on me fît confiance, je voulais que l'on espérât rien de moi. Je ne voulais pas être bon, je voulais que l'on me haît, que l’on se moquât de moi et que l'on me méprisât. Mais quand je ne serai plus là, vous sentirez combien vous me regrettez. Payez mon serviteur. »
Perplexe, j’ai quitté les lieux – le chantier en construction ou en démolition. Une mouche, qui avait survécu de façon inexplicable aux gelées hivernales, s’est posée sur ma main colorée de vert-de-gris.
!!! Allez au théâtre, avant qu'il ne soit trop tard. !!!
2
Tandis que je rentrais chez moi, quittant la salle de répétitions, après encore une journée de travail, je remarquai qu’une femme de ménage m’observait dans le couloir, entre les toilettes et l’escalier. Grise comme une femme de ménage, à peu près de mon âge, elle me sourait aimablement, d'un air bienveillant. Lorsqu'elle m'a vu trébucher légèrement, elle m'a dit en allemand, avec un léger accent: "Vorsicht" et "Guten Tag" et puis "Ach ja". Elle m'a fait penser á Herta Müller. C'est à elle, à cette femme de ménage, que je dédie mon travail.
Mattias Langhoff